Journal Schweiz Arch Tierheilkd  
Verlag GST  
Heft Band 165, Heft 11,
novembre 2023
 
ISSN (print) 0036-7281  
ISSN (online) 1664-2848  
online seit 31 octobre 2023  
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Focus

Le Conseil fédéral ne voit pas de moyens d’action

Nicole Jegerlehner

La thématique de la pénurie de personnel qualifié et du manque de relève en médecine vétérinaire a fait son entrée au Palais fédéral: le Conseil fédéral ­a pris position sur une interpellation déposée par le conseiller national Lars Guggisberg.

La pénurie de personnel qualifié fait courir à la branche vétérinaire un risque de pénurie de soins vétérinaires de base. À l’initiative de la Société des Vétérinaires Suisses (SVS), le conseiller national Lars Guggisberg (UDC, Berne) et son cosignataire Lorenz Hess (Le Centre, Berne) ont déposé, le 4 mai 2023, une interpellation demandant des informations au Conseil fédéral sur les mesures prises pour lutter contre la pénurie de personnel qualifié et le manque de relève en médecine vétérinaire, telles que l’augmentation du nombre places d’études en médecine vétérinaire ou des incitations pour la médecine des animaux de rente dans les régions périphériques (voir également l’encadré à la page 694).

Le Conseil fédéral a rendu sa réponse. Il cite l’étude sur la situation de l’approvisionnement en médecine des animaux de rente en Suisse, réalisée par la faculté Vetsuisse de Berne en 2018. Celle-ci est arrivée à la conclusion que la sécurité de l’approvisionnement était bien, voire très bien garantie, mais que la Suisse ne formait pas suffisamment de vétérinaires pour couvrir les besoins futurs en praticiens pour animaux de rente. «Garantir sur le long terme une relève suffisante en médecine vétérinaire pour la branche des animaux de rente est une problématique complexe qui porte non seulement sur le nombre de places de formation, mais aussi sur l’attrait des conditions de travail», écrit le Conseil fédéral.

Aucune compétence

La Confédération ne disposerait d’aucune compétence pour augmenter le nombre de places de formation à la faculté Vetsuisse des Universités de Berne et de Zurich ou pour ordonner la création d’un troisième site, poursuit la réponse. De plus, le nombre de places d’études serait passé de 150 à 172 au cours des dernières années. «Accroître encore ces capacités sans nuire à la qualité de la formation nécessiterait des investissements très importants dans les infrastructures et une forte augmentation de personnel, poursuit le Conseil fédéral. La partie clinique de la formation, en particulier, nécessite une structure clinique qui ne peut pas être mise en place d’emblée dans d’autres institutions de formation.»

Davantage de formation pratique

La faculté Vetsuisse aurait reconnu la nécessité d’encourager l’acquisition de «connaissances professionnelles» pendant les études et remanié à cet effet le plan de formation. Pour la période d’encouragement 2021–2024, la faculté recevrait ainsi 1,2 million de francs à titre de contributions liées à des projets pour la mise en place d’une structure de modules externes de formation en cabinet pour les étudiants.

Le Conseil fédéral ne se reconnaît pas non plus de compétences d’action en ce qui concerne les conditions de travail: «L’association professionnelle compétente, la Société des Vétérinaires Suisses (SVS), a toutefois reconnu le problème et élaboré des directives», indique la réponse. En outre, le service vétérinaire public s’efforcerait de réduire autant que possible la charge administrative pour les vétérinaires et d’indemniser ceux-ci.

Le point de vue de la SVS

Lors de sa séance du mois de septembre, le Comité de la SVS s’est penché sur la réponse du Conseil fédéral et constate la chose suivante: «Dans sa réponse à l’interpellation Guggisberg relative à la pénurie de personnel qualifié et au manque de relève en médecine vétérinaire, le Conseil fédéral ne fournit guère d’indices sur la suite qu’il y sera donné.» L’exécutif fédéral reconnaît certes que l’approvisionnement en soins vétérinaires de base est d’une grande importance en Suisse, mais il ne veut pas décider de mesures immédiates. La SVS prévoit donc des entretiens avec la faculté Vetsuisse, l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV), certains parlementaires ainsi que les services cantonaux compétents en matière de hautes écoles. Il faut en effet d’urgence agir aujourd’hui pour assurer les soins des animaux demain.

La SVS juge par ailleurs critique la référence du Conseil fédéral à l’étude sur la situation de l’approvisionnement en médecine des animaux de rente en Suisse réalisée en 2018 par la faculté Vetsuisse de Berne: le résultat de l’étude est en effet en lien avec les conditions de travail des vétérinaires, qui ne sont aujourd’hui plus adaptées à notre époque. C’est pour cela que la sécurité de l’approvisionnement est menacée.

La SVS a élaboré un catalogue de mesures, où elle propose notamment d’augmenter substantiellement le nombre de places d’études, d’examiner un accès différencié aux études, par exemple via une passerelle, de créer des systèmes d’incitation pour la médecine des animaux de rente dans les régions périphériques et de réduire les contraintes administratives.

Le Palais fédéral à Berne. (© SVS)

«Nous formons trop peu de vétérinaires»

Lars Guggisberg, conseiller national UDC bernois. (© SVS)

Le conseiller national UDC bernois Lars Guggisberg prend position sur la réponse du Conseil fédéral à son interpellation concernant la pénurie de personnel vétérinaire qualifié.

Pourquoi vous engagez-vous sur le thème de la pénurie de personnel qualifié et du manque de relève en médecine vétérinaire?

Je m’engage pour tous les groupes professionnels que nous pouvons soutenir face à la pénurie de personnel qualifié, y compris dans le domaine de la médecine vétérinaire. Une intervention au niveau de la Confédération s’est alors imposée.

Le Conseil fédéral n’est apparemment pas de cet avis: il estime qu’il n’est pas compétent.

C’est un phénomène malheureusement observé: les différents niveaux de l’État se rejettent mutuellement la responsabilité. La formation des vétérinaires est toutefois une tâche conjointe. Il est trop facile pour la Confédération de nommer les cantons pour seuls compétents.

Vous n’êtes donc pas satisfait de la réponse du Conseil fédéral?

Je n’en suis pas du tout satisfait! Mais je ne vais pas lâcher. L’interpellation a été la première étape au niveau fédéral. Nous allons maintenant faire appel à des députés du Grand Conseil pour obtenir quelque chose au niveau cantonal.

Vous êtes conseiller national bernois: allez-vous aussi essayer d’obtenir quelque chose au Parlement zurichois ou uniquement à Berne?

C’est une thématique que nous devons aborder dans sa globalité. C’est pourquoi nous allons également activer des contacts dans le canton de Zurich, afin que les Parlements des deux cantons d’implantation de la faculté Vet­suisse soient actifs.

Vous attendiez-vous à une autre réponse du Conseil fédéral?

Je ne perds jamais l’espoir d’obtenir une réponse substantielle. Mais cet espoir a déjà souvent été douché. Peut-être devrions-nous maintenant formuler des exigences concrètes et déposer une motion. Mais nous allons au préalable analyser laquelle d’une intervention au niveau cantonal ou fédéral est la plus efficace.

Quels sont pour vous les points les plus importants de votre interpellation?

L’augmentation marquée du nombre d’étudiants est centrale. Nous formons trop peu de vétérinaires en Suisse. Ce n’est pas durable de dépendre de la main-d’œuvre qualifiée étrangère. Mais la passerelle, et donc une meilleure perméabilité dans la formation, est également une thématique importante, tout comme la promotion des stages.

Interview: Nicole Jegerlehner

 
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